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Les mots d'hugo

nouvelles

Renaissance 2015

26 Décembre 2022 Publié dans #nouvelles, #recueil de nouvelles

Un recueil de nouvelles écrits en 2015 sur les thèmes  de l'amour et de la conscience.

Couverture d'un recueil monté en 2015

Couverture d'un recueil monté en 2015

Une larme.

 

 

 

 

 

 

L'univers s'ouvre, offrant au voyageur sidéral ses mille et une mer­veilles. De son cœur s'élève un ineffable battement, porteur d'une abyssale émo­tion, qui s'éparpille à travers l'espace pour tout guérir, tout faire resplendir. Un chant céleste et divin, celui de la cohorte des anges, l'accompagne dans ce mer­veilleux accomplissement. Ensembles, ils créent une extraordinaire et unique pensée ; l'amour ! Puis, ils invoquent les muses, les convoquent pour leur confier la lourde mission de délivrer ce splendide et rédempteur message à tra­vers les galaxies, les univers.

Ce merveilleux sentiment émancipe tout sur son passage, appor­tant la délivrance qui décourage irrémédiablement l'indifférence. De ce fait, la liberté tombe les masques, se découvre plus ésotérique, plus enivrante que ja­mais. Partout l'existence prend une nouvelle teinte, une nouvelle aura et s'im­mole sur l'autel du bonheur, de la joie, affranchissant les âmes du subtil et terri­fiant joug de Chronos pour l'éternité.

Un monde se meurt, un autre naît. C'est la splendeur qui prend forme, se réalise tandis que la vie s'en va puis revient, offrant à toutes les entités cet espoir un peu fou qui les poussent à rêver d'absolu, de retour à la source.

La fontaine de jouvence coule à nouveau abreuvant les âmes et an­nihilant cette inextinguible soif qui les torturait depuis trop longtemps. Enfin, c'est l'absolution ; la libération totale et inconditionnelle de l'essence.

Les barrières, qui semblaient jusqu'alors infranchissables, tombent et écarquillent les yeux de toute la création, laissant l'émerveillement s'y installer. Les œillères s'en sont allées, laissant la vision s'esbaudir de cet uni­versel amour qui, de sa divine magie, transcende et englobe tout.

Quelque part, au milieu de cette fantasmagorie, une petite planète bleue participe silencieusement à cette transformation. Elle soutient ce grand dessein en harmonisant les existences, les âmes qui partagent sa destiné et en laissant planer le souffle prometteur de la rédemption, de la grâce.

L'un de ces habitants est particulièrement réceptif à cette évolu­tion, cette transformation, cette promesse qui l'attire, puis le guide et l'éveille.

 

Comme sortant d'un doux rêve, Richard s'est assis sur son lit, per­suadé que sa mère vient de l'appeler. Mais la nuit, le silence planent sur la de­meure familiale ; tout y est calme, endormi. Cependant, il se lève, descend vers le jardin poussé par une pulsion, aussi imperceptible qu'incompréhensible, qui le captive et le conduit, sans précipitation, vers l'extérieur.

Encore aux portes du rêve et du sommeil, il avance à tâtons, in­conscient de l'étrangeté de la situation. C'est donc avec confiance, avec sérénité, qu'il ouvre doucement la porte et pose ses pieds nus sur la terre nourricière. Aussitôt, il sait que cet instant lui appartient, qu'il est porteur de quelque chose de beau, de grand ; il le ressent, le pressent.

Du haut de ses huit ans, il lève la tête vers les cieux, isolé dans la nuit, et découvre un surprenant spectacle qu'il pense être joué pour lui seul. Son regard plein d'une étonnante ferveur, surprend les astres et les étoiles en plein mouvement, comme si ils se préparaient à une spatiale farandole. Etonnement cette perception ouvre une faille dans son cœur et y place la lumière puis un in­tense sentiment de bonheur, de bien-être. Au fond de cette anfractuosité, se dessine la surprenante vérité qui le déstabilise un peu et fait naître une forme de peine qui s'envole presque instantanément sans qu'il ne sache trop comment, ni pourquoi. Peut-être est-ce dû à cette petite voix qui parle à la pureté de son âme d'enfant et qui l'instruit de son prochain voyage de retour ; l'y prépare.

A présent, il sait ; tout est bien, tout est prêt ; l'heure est venue !

Comme pour répondre à cette injonction, une nuée d'étoiles semble se détacher et descendre vers la terre. Richard sait déjà que c'est vers lui qu'elles se dirigent. Elles viennent à sa rencontre, pour l'accompagner jusque chez lui.

Sachant qu'il ne peut faire demi-tour et revenir en arrière, les déci­sions incarnant ce moment ayant été prises il y a bien longtemps, il baisse la tête, se recueille. Ses dernière pensées vont à ses parents, à sa famille qui dort encore confortablement derrière son dos sans se douter un seul instant du des­sein qui se joue en ce moment. Mais, ses préoccupations quittent son esprit, s'éloignent ; maintenant, il est temps !

 

Guidé par des pulsions oubliées, Richard s'assoie au sol et respire ; il se prépare. Le douce litanie tombant du firmament s'est faite plus intense, plus vibrante à son oreille, renforçant son appel. Dans quelques instants le grand voyage va commencer et son être tout entier en a conscience, alors il s'y apprête calmement, ferme les yeux et laisse le destin prendre place.

Dans un premier temps, il plonge vers l'inconscience puis ses sens refont surface, étonnements différents. Il se sent léger, apaisé, prêt à être, à vivre, à tout. Si léger qu'il s'élève vers les cieux, laissant derrière lui sa famille, son passé et son corps.

Lentement tout d'abord, puis de plus en plus vite, il rejoint la fa­randole étoilée, se libère définitivement des liens qui furent tissés et créés dans les prémices de cette vie. Puis, un sourire illumine son visage lorsqu'il retrouve le peuple des étoiles, ses frères, ses sœurs. Ceux qui, comme lui, participent à l'Un, détenteur de toutes les dimensions du devenir.

Cependant, une voix, venant de loin, de plus bas, pleine de dou­leur, de peur, semble vouloir le retenir. Alors, il freine un instant sa progression et se retourne, une dernière fois, sur ce qui n'est pas encore englobé par l'intem­poralité. Là, il découvre sa mère, les bras tendus au ciel en une invocation fu­neste. Les larmes inondent son visage, déforment sa voix.

Mais Richard sait qu'il est maintenant trop tard, que Chronos s'est figé à tout jamais, que son destin est ailleurs. Cependant son cœur plein de joie, de compassion, ne s'est pas encore totalement libéré de son attachement ter­restre, de ses sentiments humains. Pour lui, c'est encore un peu sa maman. Cette perception fait monter une larme de douceur à ses yeux qui, brusquement, roule sur sa joue et quitte les cieux pour un voyage vers la terre.

 

Sa mère, toute à son affliction, ne voit pas la larme qui se dépose à ses pieds, dernier cadeau d'amour d'un enfant qui sait la souffrance mais ne connaît que la délivrance. Cadeau d'adieu pour celui qui retourne vers les cieux, parmi les siens, parmi les dieux.

Ivre de douleur, elle tombe à genoux, le visage dans les mains comme pour tenter d'endiguer le flot de ses pleurs. Puis ses jambes vacillent à leurs tours, l'obligeant à poser les mains au sol comme pour retenir le poids qui l'accable à cet instant. Elle est à son désespoir, à sa torture, prisonnière d'un piège occultant la beauté de l'instant. Puis, peu à peu, la vague de chagrin semble se retirer de son être et laisser place à une étonnante perception de la paix. De sa matrice monte un sentiment de joie, de bonheur indescriptible qui l'affranchit définitivement de sa souffrance, de son incompréhension.

Elle sait que Richard baigne désormais dans le flot universel de l'amour absolu, qu'il s'est libéré. Cette connaissance de la vérité ouvre son cœur, puis son esprit, tandis que les larmes peu à peu se tarissent, laissant place à un étonnant sentiment de joie, de bonheur, qui tisse sur son visage encore humide un sourire béat et complice.

Encore à genoux, les mains au sol, elle respire lentement, les yeux fermés, essayant de retrouver les sensations inhérentes à la vie terrestre. Sor­tant des abysses, elle redécouvre la vie, la réalité qui l'accompagne, reprend pos­session de ses sens, de ses perceptions.

Mais, elle ne se sent pas encore tout à fait prête à affronter cette nouvelle existence ; la peine est trop proche, trop palpable.

Toujours à terre, elle s'accorde un instant de répit, une minute de liberté, essayant de se débarrasser des dernières traces énergétiques de son pas­sage en enfer. Puis, parce que la vie doit continuer, parce que derrière, dans une chambre de la maison, dort encore Mélodie, sa désormais seule et unique en­fant, parce qu'il faudra lui expliquer où est allé son frère, puis la consoler et l'ai­der à grandir, elle fait un effort de volonté, reprend pied, reprend place.

En ouvrant ses yeux encore meurtris, elle devine tout d'abord plus qu'elle ne voit, un petit point brillant posé entre ses mains. Sans en avoir réelle­ment conscience, elle s'en empare, se relève lentement, le corps et le cœur en­core bien lourds, puis se dirige vers sa demeure.

En parcourant ces quelques mètres qui lui semblent s'étirer à l'in­fini, elle prend conscience de sa main serrée comme un étau, de la légère brû­lure qui stimule sa paume. Aussitôt elle s'arrête, ouvre doucement les doigts. Au milieu de cette main tendue, devant ses yeux, brille une petite larme de diamant, celle qui Richard lui a offerte pendant son ascension. Une larme de diamant comme cadeau d'adieu, symbole de la pureté d'un amour qui ne put être pleinement partagé sur cette terre. Symbole de beauté, d'espérance, de joie et de bonheur.

Cette offrande efface les dernières scories d'un ressentiment im­perceptible et la libère définitivement, lui accordant la paix. Maintenant, elle se sent merveilleusement bien, extraordinairement heureuse. Instinctivement, elle lève les yeux vers le ciel et lance une prière à l'univers qui semble éclater de rire comme un enfant ayant fait une bonne blague : « Va Richard. Sois heureux. Aime cette féerie mon enfant, tout y est si magnifique. Vie cette fabuleuse aven­ture à travers les étoiles, à travers l'univers. Moi je reste ici. Le temps court tou­jours sur le manuscrit de ma vie. Mais je sais quel fantastique amour tu portais et portes encore en toi. Merci pour tout. A bientôt ! »

Désormais tout est dit, compris, accepté. Elle referme la main sur le précieux cadeau puis reprend le chemin de la maison, le visage illuminé d'un invraisemblable bonheur. Elle retourne à sa vie, plus heureuse que jamais. Il y a encore tant de gens qu'elle aime ; tant à aimer !

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Extrême frisson ( Erotique! )

30 Novembre 2022 Publié dans #nouvelles

 

Il y avait fête à l’hôtel particulier du Duc de Saint-brissin. Le champagne, issus de chais appartenant à la famille depuis des générations, coulait à flots tandis que les mets les plus invraisemblables s’épanouissaient avec exubérance sur toutes les tables.

Perdue dans le dédale de cette immensité, Béatrice errait en quête d’une conversation ; contrairement aux gens se trouvant là, elle avait d’autres préoccupations que les cours de la bourse, du marché immobilier. Riche héritière d’une famille flamande, elle passait le plus clair de son temps à dilapider son immense fortune. Mais, ce soir, elle était d’humeur maussade ; son dernier amant venait de la quitter pour plonger dans les bras d’une roturière. Quel affront ! Ne voulant pas se prêter au jeu de la haute société et faire bonne figure, elle cherchait plutôt l’esclandre, aguichant tous les hommes qu’elle croisait !

Dérivant tel un bateau ivre, elle aperçut, seul dans un coin, un éphèbe n’appartenant manifestement pas à cette société. Il n’en fallait pas plus pour attiser sa curiosité et exciter son instinct de chasseresse.

Très vite son attitude provocante, à la limite de la bienséance, mit l’apollon dans l’embarras. Le rouge aux joues il se trémoussait maladroitement, incapable de repousser cette déesse qui versait à son oreille des mots outrageusement licencieux, à la saisissante barbarie. A n’en pas douter, son langage frôlait l’indécence.

Puis, brusquement, peut-être sous l’emprise de l’alcool ou encore du désir, l’attitude de l’adonis se modifia. C’était maintenant lui qui susurrait à l’oreille de Béatrice, enflammant son visage.

Secrètement elle était enchantée de ce retournement de situation, ravie de sentir la rougeur de ses joues qui répondait plus à son désir qu’à sa pudeur.

La nuit durant, ils restèrent à l’écart, blottis dans l’ombre, poussant à son paroxysme l’échange verbal et, faisant tant et si bien, que leurs mains se mirent à s’exprimer aussi ; effleurant une cuisse ici, une hanche par là ! Outrepassant l’endroit, la notion de temps et d’espace, ils choquèrent bien des regards tant le halo d’excitation et de tentation qui les entourait était perceptible dans le vaste salon.

Puis la fête prit fin, au chant du coq. La cohorte des visages fatigués, des corps usés s’étira lentement accordant à Béatrice et au jeune homme un instant de répit avant l’ultime séparation. C’était plus qu’il ne leur en fallait pour s’enlacer et s’embrasser sauvagement, répondant enfin au sourd appel qui grondait en eux depuis trop longtemps.

Quand ils purent séparer leurs corps endoloris par la puissance de leur flamme, ils firent le tour du parc main dans la main, essayant de reprendre leurs esprits. Puis, arrivé devant la grille aux armoiries familiales, ils échangèrent leurs numéros de téléphones et se promirent de passer le prochain week-end ensembles.

 

Béatrice fut tirée de ses rêveries bucoliques par la sonnerie stridente du téléphone. Quelques secondes plus tard Magdalena, la gouvernante, apparaissait le combiné à la main : « Madame, c’est un jeune homme qui désire vous parler et refuse de dire son nom. Il m’a juste dit que vous attendiez vraisemblablement son appel ! Dois-je vous le passer ? » Le cerveau encore embrumé, Béatrice fit une moue significative. Aussitôt, Magdalena fit volte face, prête à quitter l’endroit et à dire son fait à ce personnage mystérieux et si mal élevé. Mais elle n’eut ni le temps de respirer, ni le temps de bouger : « Attendez ! Je vais le prendre ! »

Le souvenir du beau jeune homme déluré venait de refaire surface, faisant bondir son cœur dans sa poitrine. En prenant le combiné, elle souriait telle une hyène prête à dévorer sa proie. Ses joues s’étaient légèrement colorées, sa respiration accélérée tandis qu’une douce mais terrifiante chaleur s’installait dans son bas ventre. Le désir s’emparait d’elle !

Cette vision fit fuir la gouvernante qui la connaissait trop bien pour ne pas deviner les pensées innommables qui la traversaient. En retournant à l’office, elle plaignit secrètement le jeune homme pensant que sa patronne n’en ferait sûrement qu’une bouchée ; elle en avait vu tant arrivé puis s’éprendre pour finalement repartir à moitié torturé, à moitié humilié.

Loin de ce genre de considération, Béatrice se démenait comme une folle dans le vaste appartement. Le temps s’était enfui trop rapidement depuis que Rodolphe l’avait appelé et il ne lui restait que trente petites minutes pour se préparer. Elle se sentait étrangement tendue, comme prête à exploser. Cela faisait bien longtemps qu’un homme ne l’avait pas mise dans cet état, tantôt tourmentée, tantôt réjouie, mais surtout impatiente et ivre de désir. Elle en devenait presque hystérique, quasiment tyrannique et Magdalena qui servait d’habilleuse pour l’occasion en pâtit amèrement.

Lorsque la sonnerie de l’interphone résonna dans le vestibule, Béatrice finissait de s’admirer. Elle avait soigné le moindre détail. Son maquillage mettait ses splendides yeux verts en valeur sans toutefois être trop apparent, tandis que son tailleur soutenait les formes voluptueuses de son corps et rehaussait admirablement la teinte émeraude de son regard de braise. L’ensemble avait de l’allure, de la classe même et dissimulait malicieusement un brin de folie, une touche de vice.

Dans l’entrée elle s’arrêta quelques instant devant le miroir. D’un geste théâtral elle tira un tube de rouge à lèvres de son sac et rendit à sa bouche toute sa fraîcheur, sa sensualité. Elle savait si bien mettre ses atouts en valeur que cela en était, avec le temps, devenu un véritable jeu d’enfant. Une trop facile contribution à l’instauration de son tableau de chasse. Un dernier regard au miroir, un dernier sourire carnassier et elle s’envolait pour l’aventure.

Elle était prête à tout vivre, tout accepter pour ce Rodolphe qui l’attendait en bas et faisait naître dans sa chair des pulsions inavouables aux images indécentes. En fait, il était l’incarnation de son fantasme le plus fou ; sensualité et sexualité paroxysmiques. Mais ne voulant rien laisser paraître pour l’instant, elle fit une brève halte avant de pousser la lourde porte de l’immeuble. Elle reprenait le contrôle de ses sens, de sa respiration, de son cœur battant à tout rompre. Et quand elle fut prête, elle s’élança.

Sitôt la porte franchit, Béatrice se figea, dissimulant péniblement sa surprise. A ses pieds, un parterre de roses s’étirait jusqu’à la voiture de Rodolphe qui l’attendait, porte ouverte, une gerbe délicatement en attente sur le toit. Masquant une éphémère hésitation, elle redressa la tête, figea un sourire de rêve sur sa bouche sensuelle et s’avança balançant les hanches juste ce qu’il faut pour qu’on y devine une sensualité prête à être allumé.

De son regard de braise elle fouilla l’habitacle de la voiture, étonnement resté dans l’ombre, essayant d’y deviner le visage de son chevalier servant. Ce fut en vain. Cependant cette touche de mystère raviva l’excitation qui l’avait jusqu’alors quitté. Elle en fut étonnée puis amusée malgré l’étrange sentiment de menace impalpable qui prenait vie dans ses entrailles. En son fort intérieur, elle sentait que celui qui l’attendait ne serait pas aussi malléable et vulnérable qu’elle l’avait tout d’abord pensé. Cette découverte amplifia tant et si bien son désir qu’un vertige l’assaillit l’espace d’une seconde. Elle était aux anges ; enfin elle croisait un homme qui pourrait être son égal, voir son maître ! Cette pensée était une jouissance en elle-même et présageait d’un week-end piquant, voir torride. Son sexe prêt à se tendre et déjà humide en était le seul témoin, apportant à l’instant une touche de merveilleux attendu trop longtemps.

Elle prit les fleurs sur le toit du véhicule et s’installa. Elle devina, plus qu’elle ne vit, les yeux flamboyant de Rodolphe qui, au regard de l’atmosphère électrique et suffocante de la voiture, n’avait rien perdu de son émotion. Béatrice en fut heureuse comprenant qu’il partageait son état d’excitation.

Rodolphe se pencha doucement vers elle et déposa un baiser brûlant sur sa joue. Puis, il lança son engin à travers les rues illuminées de la ville laissant nonchalamment passer sa main du pommeau de vitesse à sa cuisse gantée de soie. Le contact de cette main, à la fois chaude, ferme et douce, la fit frissonner de tout son être au point de lui couper la respiration un instant.

L’atmosphère de ce lieu confiné était devenue intolérable, saturé par la tension qu’ils étaient désormais incapables de contrôler. Et, tant pour briser le silence spectral que pour apporter un semblant de fraîcheur, ils unirent leurs doigts sur la commande d’ouverture des fenêtres.

Quelques minutes plus tard, ils empruntaient une petite venelle sombre, semblant se perdre en un no man’s land ténébreux et blafard. Mais lorsqu’il tourna au bout de la ruelle les phares du véhicule illuminèrent l’endroit se reflétant sur une immense paroi de verre.

L'édifice se dressait fier et glacial mais ne fit pas ralentir Rodolphe comme s’il s’apprêtait à le percuter. Béatrice posa sa main sur le bras du jeune homme, prise par le doute, par la peur. Quel jeu étaient-ils en train de jouer ? Que cherchait-il ? Mais, en voyant l’immense pan de verre se dérober, elle desserra son étreinte et lâcha un éclat de rire libérateur tandis que la voiture pénétrait dans le vaste espace aux plafonds hors de vue.

A l’autre extrémité du bâtiment, Rodolphe engagea le cabriolet dans un immense ascenseur qui les mena en haut de l’immeuble.

La porte s’ouvrit sur une pièce grandiose. Rodolphe y glissa le coupé puis vint ouvrir la porte de Béatrice encore muette de surprise, bien qu’elle n’en fit rien paraître. Sous le pâle éclairage de la lune, elle avait du mal à déterminer les vastes dimensions de l’endroit, et supposait que cette mi-obscurité cachait quelques surprises supplémentaires. Sur ce dernier point, elle avait vu juste.

D’un claquement de doigts, Rodolphe illumina la pièce et s’inclina cérémonieusement avec un étrange sourire, la priant d’entrer : « Vous voici chez moi ! »  

Béatrice n’en croyait pas ses yeux. Elle pénétrait dans le plus merveilleux et le plus grandiose loft qu’elle ait eu l’occasion de voir. D’invraisemblables baies vitrées s’étalaient à perte de vue semblant tendre leur livide froideur vers des plafonds inaccessibles, presque invisibles, mais sur lesquels elle devinait néanmoins la voûte céleste peinte en trompe l’œil. Un moment elle en admira la beauté, la perfection, louant secrètement le talent de celui qui l’avait réalisée. Puis, ses yeux glissèrent vers le sol découvrant les murs tantôt blancs, tantôt noirs sur lesquels, semblaient jouer à cache-cache, des centaines de tableaux dignes des plus grands musées. Enfin son regard rencontra le sol tendu de marbre rose sur lequel étaient harmonieusement disposées nombres de sculptures n’ayant rien à envier aux toiles qui foisonnaient sur les murs. C’était féerique, presque incroyable. Un vrai palais des milles et une nuit.

Elle fut tirée de son observation par la douce et chaude main de Rodolphe qui se glissait dans la sienne : « Viens, le bar est par ici ! »

En la guidant, il lui expliqua que la pièce s’étalait sur plus de deux mille cinq cents mètres carrés, sous une hauteur de plafond avoisinant les trente mètres. En son centre, il avait fait poser une immense piscine éclairée par le fond qui inondait cet espace d’une lueur vacillante et tendre.

Des plateformes disséminées ça et là accueillaient les espaces plus intimes. Quelque part, dans le ventre de ce monstre hors de proportions, s’étalait une cuisine aux dimensions invraisemblables, toute de marbre noir et de verre ! Sur la gauche de la piscine, la baignoire s’étendait majestueusement et offrait une vue imprenable sur le jardin intérieur.

Béatrice s’était laissée docilement guider, trop éberluée pour résister. En arrivant au bar, elle découvrit quelques bouquets de rose jetés ici et là. Un instant, elle ferma les yeux et respira. S’en était trop, ses barrières s’estompaient lentement laissant libre court à un flot de douceur. Enfin elle lâchait prise et redevenait elle-même. Mais, elle ne retrouva l’usage de ses sens qu’après avoir englouti son premier bourbon.

« Une coupe de champagne, avait délicatement proposé Rodolphe ? Non, pas maintenant, avait répondu Béatrice. Quelque chose de fort s’il te plait ! Un bourbon si possible ! »

Puis, ils avaient ouvert une bouteille de champagne et Béatrice avait été de retour, plus provocante et carnassière que d’habitude. Durant plus de temps qu’il pensait pouvoir supporter, elle avait planté son regard de braise dans le sien. Mais brusquement les rôles avaient été inversés. Une étrange lueur s’était allumée dans les yeux de Rodolphe, comme une sorte de désir impatient, de passion ! Puis très rapidement, leurs yeux ne se quittèrent plus, la pression s’accentua. L’air semblait vibrer à leur contact, créant un étrange halo luminescent.

Prêt à tout rompre, Rodolphe prit la main de Béatrice : « Viens ! Je t’emmène dans mon sanctuaire ! » Elle n’hésita pas une seconde et prit la douce main qu’il lui tendait.

Ils s’arrêtèrent sous l’une des nombreuses plateformes. Rodolphe regarda Béatrice et sans un mot, il l’embrassa. Elle s’abandonna conquise, prête à tout !

Elle était encore sous le coup de son émotion. Sous le joug de ses sensations. Pleine de la chaleur de l’ivresse. Lorsque Rodolphe tira de sa poche un bandeau noir et lui banda les yeux. Déjà avide de sens, Béatrice s’abandonnait plus encore. Proche de la transe, de l’extase !

Elle avait désiré cet instant si longtemps ; se convertir en objet de désir, de plaisir. Excitée à l’extrême, elle était prête à s’offrir, à s’étourdir ! Mais un relent de conscience, plus proche de la peur, prenait vit en elle, bien qu’elle ne fusse menacé d’aucune manière. N’avait-elle pas finalement simplement peur d’elle-même, de ses limites, de ses désirs ?

Elle était incapable de le savoir. Le voulait-elle ? Son excitation balayait tout, comme une coulée de lave, tandis qu’elle se laissait guider par Rodolphe le long de l’escalier. Sa pensée s’était figée, annihilée par ses sens à leur apogée.

Puis, elle entendit une porte se fermer. Sentit une main sur ses hanches, un souffle sur sa nuque. Un souffle chaud comme ceux des prédateurs.

Son échine frissonna faisant naître un désir accaparant tous ses sens. Elle flottait dans une brume éthérée, submergée par un vertige incontrôlable ; les sens ballottés au fil de ses fantasmes ! Mais la bouche de Rodolphe effleurant la sienne, leva le brouillard ! Elle reprenait le contrôle de ses sens ; retrouvant sa conscience elle quittait la pulsion et renouait avec l’ardent désir qui laissait le côté animal pour une phase cérébrale.

Béatrice revenait dans le décor, retrouvait ses armes, sa combativité. Ne voulant pas passer à côté de l’instant, elle tendait tout son être, sachant déjà inconsciemment que quelque chose dépassait ses pulsions physiques. En fait, Rodolphe n’attirait pas que son corps mais son être tout entier. Cependant la peur empêchait Béatrice de se laisser porter par ce courant. N’ayant jamais rencontré telle sensation, elle se sentait perdue, fragile. Sa seule porte de secours se focalisait sur son désir et elle s’y accrochait comme si sa vie en dépendait.

Quand elle embrassa Rodolphe à son tour, elle entrouvrit les lèvres invitant à plus d’ardeur. Il y répondit aussitôt partant à la conquête de sa bouche. Le désir, la sensualité et la retenue qu’il avait mis dans ce baiser avait ramené un frisson sur l’échine de Béatrice, fait naître une boule de feu dans son bas-ventre. Le désir affaiblissait ses jambes qui tremblaient déjà sous l’impatience. Elle voulait sentir Rodolphe en elle, le sentir vivre puis jouir et ce, jusqu’à ce qu’elle en perde haleine, jusqu’à l’évanouissement.

Percevant cette forme d’offrande, Rodolphe fit glisser la veste de Béatrice au sol. Puis il dégrafa son chemisier, effleurant à peine les boutons et, l’accompagnant au sol, il fit disparaître la jupe.

Derrière son bandeau Béatrice imaginait le visage de Rodolphe, un doux sourire illuminant ses traits, contrastant avec le regard de braise qu’elle aurait voulu voir plonger dans le sien. Elle sentait le souffle de son excitation parcourir son ventre. Elle se sentait offerte, fragile, parée de dentelles et de soie mais navigant dans le noir. C’était effrayant et excitant à la fois !

Elle sursauta quand il toucha ses épaules, tressaillit en le sentant se coller à son dos et, cambra les reins sous le frôlement de ses doigts sur le long de sa colonne vertébrale. Mais, quand il caressa ses mamelons déjà extraordinairement tendus, elle eut un vertige. Comme si une explosion avait eut lieu dans son bas-ventre et projeté une énergie considérable vers les cieux. Elle se sentait immense, la tête bien au-delà des nuages.

Elle s’en remettait à peine lorsqu’il posa ses mains sur l’intérieur de ses cuisses et commença à la caresser, s’approchant peu à peu de son entrejambe humide de désir, sans jamais l’effleurer.

Une nouvelle explosion propulsa son esprit à travers l’espace. La délivrant à jamais de toutes ses barrières, de tout ses doutes, ses peurs et ses rancoeurs. Pour la première fois de sa vie, elle se sentait vraiment femme, libre et merveilleusement vivante.

Cependant, Rodolphe continuait de la caresser langoureusement comme s’il avait voulu toucher le moindre centimètre carré de ce corps en offrande. Puis ses caresses se firent plus viriles, plus bestiales. Alors, un intense désir s’empara de Béatrice l’emmenant aux frontières de la folie, et comme pour répondre à cet appel, elle s’empara de la main de Rodolphe et la guida vers son pubis projeté en avant. Son corps tout entier se voulait l’esclave de cette pulsion animale qui dévorait son ventre et sa poitrine tandis que sa respiration courte et sifflante accentuait l’incontournable vertige qui la dominait, la séduisait. Jamais encore elle ne s’était retrouvée dans un tel état et cela faisait naître en elle un réel sentiment de joie et de bonheur.

Puis Rodolphe la prit dans ses bras et l’allongea sur le lit. En l’embrassant farouchement, il fit rouler le string sous ses doigts, le guidant tout au long des jambes de Béatrice dont la respiration s’accéléra encore. Le contact des lèvres douces et chaudes sur l’intérieur de ses cuisses la fit tressaillir et la priva d’air quelques instants. Son souffle se fit plus pressant et elle se cambra lorsqu’elle sentit la langue de Rodolphe effleurer sa vulve. Et, lorsqu’il la mordilla délicatement, elle projeta le bassin vers l’avant laissant s’échapper un soupir.

Pendant ce qui lui paru des heures, Rodolphe continua son petit jeu, la laissant doucement s’approcher de la délivrance sans jamais l’y mener. Jusqu’à ce que, n’y tenant plus, Béatrice saisisse sa tête à deux mains et l’enfouisse entre ses cuisses tremblantes et humides.

Aussitôt, elle sentit la langue de Rodolphe la pénétrer puis ressortir pour courir sur l’intérieur de ses cuisses puis revenir et repartir encore et encore ! Et tandis qu’elle allait de nouveau saisir sa tête, il précéda son geste d’une fraction de seconde, complètement à l’écoute de sa partenaire, de ses désirs, de son plaisir. Il enserra son clitoris entre ses lèvres pulpeuses et le téta délicatement, ponctuant cette succion de petits coups de langue.

Trop tendue et trop ivre, Béatrice fut vite délivrée. Un frisson parcourut son échine, une explosion brûla son corps, déchira son crâne tandis qu’un hurlement se ruait vers sa gorge pour se répandre tel un roulement de tonnerre à travers toute la pièce. Et enfin, l’apothéose, l’orage se déchaînait, la jouissance dévorait les profondeurs de son être ; au-delà de ses sens, de sa conscience.

Rodolphe, la tête prise dans l’étau de ses cuisses, n’avait, semblait-il, pas l’intention d’en rester là et continuait de la lécher voulant la faire exploser de nouveau. Il avait eu raison. L’étreinte se relâcha et Béatrice jouit une fois encore, plus intensément, plus totalement que la fois précédente, puis une fois encore, puis une autre et encore une autre jusqu’au moment où, n’en pouvant plus, elle tira la tête de Rodolphe par les cheveux le suppliant de s’arrêter. Esclave de son plaisir, il obtempéra de bonne grâce maîtrisant maintenant avec peine l’énorme tension qui ne quittait plus son corps. Le souffle court, lui aussi, il s’allongea sur elle et l’embrassa goulûment.

Sans cesser, il prit ses poignets et les guida délicatement vers la tête du lit. Comme sous l’emprise d’un charme quelconque, Béatrice se laissa faire, encore ivre de plaisir et de jouissance. Mais, lorsqu’elle entendit le cliquetis de métal, puis sentit son contact sur sa peau, elle se raidit, essayant de résister sans grande conviction. En fait, elle voulait s’abandonner à ce nouveau jeu, cet étrange rituel. Le suivre où qu’il aille, où qu’il l’emmène ; lui appartenir totalement.

Mais ses pensées s’envolèrent sous la fraîcheur des lèvres de Rodolphe partant à la dérive sur son corps couvert de sueur. De baiser en petits coups de langue, il gravit ses seins puis plongea vers ses cuisses ; ravivant le frisson, la tension. Puis, en effleurant sa toison pubienne, il la fit se cambrer, s’offrir puis se rétracter tandis qu’il poursuivait sa course folle le long de ses cuisses en feu. Pour enfin, parvenir aux chevilles et quitter sa peau, semblant lui accorder un instant de répit.

Mais le cliquetis métallique retentit une nouvelle fois. Elle prit peur et se figea, prête à lutter. Elle se sentait prise au piège ; trop vulnérable. La peur prit le pas sur l’excitation, inondant son corps et son esprit.

Lorsqu’il enserra ses chevilles du froid métal, Rodolphe perçut cette tension proche de l’hystérie. Aussitôt, il les libéra, s’allongea à ses cotés et l’embrassa tendrement.

Peu à peu, la douceur des baisers et des caresses rassura béatrice. Elle recommençait à s’abandonner ; même si la peur tournait encore un peu dans son ventre. Attentif, Rodolphe la câlina encore un moment puis il fit glisser ses lèvres jusqu’à son oreille et de sa voix tendre, profonde et chaude, il susurra : « N’ai pas peur. Je veux te montrer le monde des plaisirs interdit, te faire explorer la vaste universalité du plaisir, de la jouissance. Laisse moi te guider, t’initier. Ne craint rien, je ne te veux aucun mal ! Aucun mal ! »

Cette voix pénétrait sa chair et les profondeurs de son être y faisant courir une vibration jusqu’alors inconnue. La douce chaleur de son timbre séduisait Béatrice et nappait sa conscience d’une brume délicieuse comme si elle avait tenté de prendre possession de son esprit. Mais, c’est pourtant pleinement lucide et en connaissance de cause qu’elle s’abandonna à la soumission de son amant.

Elle s’offrait à sa folie, à son étrange perception de la jouissance et du plaisir. Plus que tout, elle voulait être sa chose, son esclave, sa déesse de l’amour. Aussi le laissa-t-elle attacher ses jambes au plafond.

Dans cette position, les yeux masqués par le bandeau, elle s’imagina telle une esclave apprêtée pour la mise à mort. Elle était prête à tous les outrages et cette pensée fit courir l’excitation sur sa colonne vertébrale, jusqu’à ses cuisses. Enfin, le désir était de retour, l’assaillant brutalement, inondant son ventre puis son corps pour exploser en une myriade de lumière à l’arrière de ses yeux.

Elle le désirait ardemment, bien plus qu’elle n’avait jamais désiré aucun homme ; s’en était presque un supplice, une douleur. Mais les dés étaient jetés et le jeu continuait et, bien qu’elle sache qu’au moindre mot la partie cesserait, elle resta muette. Elle voulait aller jusqu’au bout, repousser ses limites jusqu’au point de rupture ; après tout elle en avait toujours rêver ! Et le rêve devenait réalité.

Une peau d’une extrême douceur caressa son visage puis ses seins, et glissa vers son ventre, ses cuisses, pour ensuite faire le chemin inverse, lentement. A chaque passage, sa peau se faisait plus sensible, plus frissonnante. Elle était haletante, à fleur de peau et au bord de l’apoplexie. L’intensité de son désir lui donnait la sensation que sa peau avait disparue et, que peu à peu, les caresses pénétraient sa chair, son âme. C’était à la fois terrifiant et merveilleusement délicieux.

Puis, les caresses se concentrèrent sur l’intérieure de ses cuisses et sur son pubis. Son sexe, déjà humide, se mouilla plus encore jusqu’à ce qu’une éjaculation vaginale lui arrache des soupires de plaisir et inonde ses fesses tremblantes.

Le souffle court, elle essayait de reprendre possession de ses esprits mais une nouvelle vague de jouissance montait déjà en elle, la submergeant tel un raz de marée. Elle hurla le plaisir qui l’envahissait à s’en déchirer la gorge tandis que dans sa tête une multitude d’explosion l’emmenait loin de son corps, loin de ce monde.

De retour, elle tenta de reprendre son souffle, la gorge douloureuse. Elle était en sueur, ivre à en mourir. Malgré cela, les caresses de Rodolphe, toujours présentes, firent, une fois encore, renaître le désir dans son ventre. C’était une véritable folie ; de la magie !

Lorsqu’il la pénétra lentement, elle compris que c’était avec son gland qu’il l’avait tant caressée, tant excitée. Cette découverte l’ébranla, la choquant presque. Mais ses pensées s’évanouirent aussi vite qu’elles étaient nées. Il était en elle.

Avec une infinie délicatesse, il se mit à aller et venir au plus profond de Béatrice, faisant un bref arrêt à chaque extrémité de son mouvement. Puis, toujours avec la plus extrême douceur, la plus grande tendresse, il accéléra le mouvement, imperceptiblement, lentement.

Soudain, elle laissa échapper un râle ; il venait de la pénétrer plus durement, plus profondément pour aussitôt reprendre le rythme lancinant qui exacerbait le désir de Béatrice. Elle était électrique, les sens à leurs paroxysmes, en ébullition. Un instant, elle crut perdre la raison sous l’impulsion de son désir, de son plaisir toujours grandissant. Sa respiration se faisait difficile. Son corps et son esprit, se consumaient, se fondaient l’un en l’autre.

Mais Rodolphe continuait de l’aimer inlassablement. Il l’amenait au bord de la jouissance et s’arrêtait, le temps que la pression retombe un peu. A chaque approche de cette délivrance, Béatrice accédait à un palier supérieur de ses sensations ; c’était extraordinaire, beau à en pleurer.

Deux heures durant, il mena le ballet de son désir, la conduisant en des lieux insoupçonnés, sur les rivages de la folie ; maîtresse de toutes les illusions.

Béatrice goûtait pleinement cette trop belle et trop forte réalité qui imprimait les profondeurs de son être. Elle était au-delà d’elle-même, au-delà de la conscience ; divinement belle et merveilleuse.

Soudain son corps se fit plus présent, plus pesant, presque envahissant. Rodolphe l’accompagnait, cette fois-ci, vers l’ultime délivrance et c’est ensemble qu’ils hurlèrent de plaisir.

Les cris se répercutèrent à travers l’espace et le temps, vibrant encore longtemps après que leurs bouches se soient tues. A cet ultime instant, leurs âmes fusionnèrent et s’élevèrent leur ouvrant les portes de ce chemin subtil qui mène au partage, à l’unification.

Sans attendre d’avoir reprit son souffle, Rodolphe la libéra de l’étreinte des menottes et tout en massant ses extrémités encore endolories, la pria de ne pas encore ôter le bandeau. Puis, il embrassa ses chevilles, couvrit son corps de baisers et goûta sa bouche tout en lui rendant la vue.

Pour la première fois depuis de longues heures, leurs yeux se croisèrent. Une satisfaction, bien au-delà des mots et des sens, les faisait briller d’un éclat sans nul autre pareil. Un sourire complice et comblé illuminait leurs visages encore couverts de sueur. Ivre de cette folle nuit de plaisir et de jouissance, il s’enlacèrent, encore incapable de percevoir cette lueur qui s’était allumée dans leurs cœurs. Ils venaient de découvrir cet extrême frisson après lequel ils avaient tant courus. Bien loin du sexe, du plaisir et de la jouissance, ils avaient trouvés le salut. Il avait toujours été là, caché dans les profondeurs de leurs cœurs et des leurs âmes et ne portait qu’un seul nom ; l’amour.

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Le puit

30 Novembre 2022 Publié dans #nouvelles

                A cet instant de ma vie, une partie de ma personnalité dérape. Je tente d’endiguer une vague de folie qui, parfois, brusquement me submerge. J’ai perdu la notion de vérité, de réalité. Ses mots sont morts à mon oreille, disparus à tout jamais avec une part de rêve. Mais ce fragment de rêve dont ils se sont emparés a fait un trou au fond de mes entrailles. Alors les feux de l’enfer s’y sont allumés m’offrant la douleur et la peine. Sous les effets de cet étrange triptyque, une explosion émotionnelle m’a dévasté. Et je me suis retrouver forgeron de l’enfer.

                Je voyais ma vie s’écrouler entre mes doigts incapables de la retenir. Son sens, son devenir m’échappait. Pour l’instant j’étais dans un puit de la vie et je tombais à vive allure, la tête prise dans un vertige.

              Cette interminable chute mettait mes nerfs à rude épreuve. La tension m’envahissait, se saisissait de mes épaules. Puis s’étirait sur mon dos pour mieux me nouer la nuque. Mes tripes se tordaient sous la douleur, le cœur au bord des lèvres. Et tout cela m’enivrait, me perdait. Lentement, mais sûrement, je sombrais. Je me perdais moi-même aux frontières de l’ailleurs.

Je lâchais les rênes de mon existence les confiant à la providence. Je n’étais plus maître de rien, parvenant difficilement à me maîtriser moi-même, tout comme j’étais incapable de résister à ce refrain entêtant et sauvage qui s’emparait de tout mon être. Je soutenais le bon rythme pour forger un enfer.

C’est à cet instant précis que tout a basculé. Je n’ai rien vu venir, puis je me suis éteint. J’étais figé, transformé en statue, hors de tout. Je m’enfermais dans la folie. Quittait un monde qui ne me convenait pas, incapable de faire autrement sur le moment. Alors, ne pouvant aller ailleurs, je me murais en moi-même.

Combien de temps suis-je resté ainsi ; trois, quatre heures tout au plus. Puis, le retour, brutal, où tout redevient palpable, tangible. La folie s’évapore doucement, se mue en paix. Du moins en quelque chose qui lui ressemble. Quand on s’est perdu dans le chaos de son individualité tout espace différencié devient un lieu de paix. Un havre, une oasis. Une escale sur le chemin.

Cependant cela ne dure pas. Le forgeron se remet au travail, son enfer n’est pas fini. Avec colère et froideur, il scande sur son enclume une mélodie guerrière qui traverse le temps pour venir au présent. Elle est unique, faite sur mesure et, sait déjà que son pouvoir aura raison de mon savoir.

Un instant je résiste essayant d’échapper

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Lange et la mort

30 Novembre 2022 Publié dans #nouvelles

                         Un ange de passage sur la terre se retrouva, de façon tout à fait fortuite et bien contre son gré, dans la plus invraisemblable des situations. Un jour s’en crier gare, il fit la plus étonnante des rencontre ; celle de la mort !

                        C’était un soir d’automne, au sortir des chaleurs de l’été. La fraîcheur de la brise annonçait déjà les futures rigueurs de l’hiver tandis que le ciel alternait son passage de nuage et d’étoiles. La vie semblait couler paisiblement. Le séraphin vaquait à ses affaires les maîtrisant d’un sens divin et, après avoir, pour quelque temps, égayé un chemin, il retournait vers son lieu de prière, son sanctuaire, quant au détour d’une rue trop sombre, il fut interpellé.

                            La mort caché parmi les ombres de l’impasse lançait un étrange hululement dans lequel il reconnu son nom. Surpris tant qu’étonné, par ce baroque appel, il s’avança vers la ruelle et distingua une étrange forme, drapée de noir, une faux à la main, et se dressant maladroitement. A son approche, elle leva la tête, laissant deviner les deux orbites vides de son faciès grimaçant, alors le grincement prit de l’ampleur. Il se répercutait maintenant sur chacun des murs, sur le sol, emplissant l’air de sa sépulcrale attente.

                         Soudain l’ange compris ce qui tendait cette rencontre ; elle était là pour lui. Lui déjà mort depuis si longtemps qu’il l’avait presque oublié. Lui l’esprit de lumière, immortel par excellence. Il rit face à cette situation surréaliste et totalement inepte. Mais, la mort ne semblait pas vouloir faire machine arrière. Elle se redressait de plus en plus ; affligeant au monde son visage squelettique, son indéfectible désincarnation et s’approchait gelant tout aux alentours.

                      Le pur esprit tenta de la raisonner, arguant fermement qu’il était hors de sa juridiction en ce qui le concernait. Que sa position, d’ange, de Séraphin pour être plus précis, faisait de lui un intouchable puisqu’il n’était déjà plus de ce monde. Bref, qu’il était mort depuis longtemps, très, précisa t-il, et que de ce fait il lui était, malgré sa sympathie et son bon vouloir, impossible d’accéder à la requête de la mort et de la suivre. Cependant, cette dernière ne l’entendait pas de la sorte. Elle fouilla son habit ténébreux et tendit la main. Dans cette dernière, il put, sur un vieux parchemin, lire son nom puis la date et l’heure à laquelle il devait quitter se monde.

                             Observateur, il regarda l’année et rit de plus belle. La mort loin d’être dans le même état d’esprit s’approcha plus encore et le prit sous son voile noir. Et tandis que les ténèbres se refermaient sur lui, il arracha l’acte qu’elle avait en main, le mit devant les orbites vides et dit : « Regarde la date ! L’an trois cent cinquante sept ! Nous sommes en deux mille trois cent cinquante sept ! Tu comprends ! »

                        Non, elle ne voulait pas comprendre ; c’est écrit ; un point c’est tout. L’ange soupira, conscient qu’avec un regard si vide il fut difficile de voir quoi que ce soit. Il tenta donc une démonstration un peu moins visuelle, fit un effort pour replonger dans ses annales et lui rappela leurs diverses rencontres.

Pour une fois son interlocuteur sembla ouvrir les yeux quelque peu ; elle se souvenait de cette rencontre en cinq cent soixante. Elle l’avait cueillit au saut du lit, d’un coup net et brutal, en serrant son cœur dans l’ossuaire de sa main. Elle avait prit sa vie, brisé son élan et laissé seul avec son incompréhension, sa difficulté à saisir la situation. Elle se revoyait très bien s’éloigner puis s’arrêter de temps à autre, se retourner et regarder cette âme en peine, encore incapable de comprendre qu’elle venait d’être libérée. Elle avait trouvé son attitude touchante, bien qu’elle fût sans vie, sans cœur, sans rien en fait. Mais c’était il y avait bien longtemps, précisa t-elle, donc cela n’avait pas d’incidence sur l’instant.

L’ange lui fit quand même remarquer le problème de chronologie entre ce dont elle se souvenait et la date qu’elle prétendait défendre. Cela troubla la mort. La secoua même.

De longue minute, elle fit silence. Puis effectua quelque pas en arrière, eut un hoquet et s’écroula sur le sol. Elle gisait dans la pénombre, dans l’essence même de son existence ; inerte, comme morte.

Il s’approcha de la mort, mit un genou à terre et avança la main vers le dais noir. Puis il prit la tête de l’infortunée, la souleva légèrement, et fut frappé par une inimaginable et insupportable odeur de mauvais alcool. Malgré cela, il l’aida à se remettre, péniblement, sur les os de ses pieds, puis d’une boule d’énergie fit disparaître son hébétude.

Immédiatement la mort fut sur pieds. Bredouilla des excuses invraisemblables, sachant pertinemment que personne ne serait dupe. Puis fit volte face et s’enfuit en flottant.

Tiens se dit l’ange en retournant vers le boulevard et la lumière, j‘avais oublié cela. Mais maintenant ces vieux souvenirs étaient mis en exergue ; la mort tous les deux ou trois cent ans, arrivait à capter des énergies pleines d’ivresse. Pour ce faire elle traînait dans certains bouges infâmes et se nourrissait des effluves de ceux qui y séjournaient. Sa viré durait deux, trois voir quatre ans, ce qui donne une vague idée de sa capacité d’absorption.

Au début de son pèlerinage son action ne se dégradait pas encore trop. Mais plus le temps avançait, plus elle faisait d’erreurs. Finissant immanquablement, la dernière année, par ne s’attaquer pratiquement qu’à des immortels et se heurter, immanquablement, à une bien réelle impossibilité. A chaque fois la lumière faisait son office et dissipait les effluves spirituels nocifs et à chaque fois, la mort replongeait de plus belle, comme pour fuir sa condition, son impardonnable rencontre.

L’ange reconnu que la tâche était ingrate, la condition on ne peut plus médiocre. Et cette convenue fit disparaître le malaise qu’il ressentait à être sur cette terre. Finalement sa position n’était pas des plus désagréables mais surtout elle était temporaire.

Cette découverte faisait encore grandir ces perceptions. Il avançait sur le trottoir et arborait un divin sourire. Toute rancœur avait disparu. Il était de nouveau heureux. Libre d’accepter sa condition et son destin. Libre d’être, tout simplement.

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Nouvelles

30 Novembre 2022 Publié dans #nouvelles

  A travers mes errances créatives, j'écris aussi quelques nouvelles. Les premières sont assez anciennes puis je vous feraient découvrir un recueil de nouvelles; parti plus loin que prévu, il n'y a pas si longtemps. J'espère que vous pourrez y voyager, que vous saurez vous évader et, pénétrer dans mon étrange psyché. Je vous souhaites un bon voyage!

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