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Les mots d'hugo

Renaissance 2015

26 Décembre 2022 Publié dans #nouvelles, #recueil de nouvelles

Un recueil de nouvelles écrits en 2015 sur les thèmes  de l'amour et de la conscience.

Couverture d'un recueil monté en 2015

Couverture d'un recueil monté en 2015

Une larme.

 

 

 

 

 

 

L'univers s'ouvre, offrant au voyageur sidéral ses mille et une mer­veilles. De son cœur s'élève un ineffable battement, porteur d'une abyssale émo­tion, qui s'éparpille à travers l'espace pour tout guérir, tout faire resplendir. Un chant céleste et divin, celui de la cohorte des anges, l'accompagne dans ce mer­veilleux accomplissement. Ensembles, ils créent une extraordinaire et unique pensée ; l'amour ! Puis, ils invoquent les muses, les convoquent pour leur confier la lourde mission de délivrer ce splendide et rédempteur message à tra­vers les galaxies, les univers.

Ce merveilleux sentiment émancipe tout sur son passage, appor­tant la délivrance qui décourage irrémédiablement l'indifférence. De ce fait, la liberté tombe les masques, se découvre plus ésotérique, plus enivrante que ja­mais. Partout l'existence prend une nouvelle teinte, une nouvelle aura et s'im­mole sur l'autel du bonheur, de la joie, affranchissant les âmes du subtil et terri­fiant joug de Chronos pour l'éternité.

Un monde se meurt, un autre naît. C'est la splendeur qui prend forme, se réalise tandis que la vie s'en va puis revient, offrant à toutes les entités cet espoir un peu fou qui les poussent à rêver d'absolu, de retour à la source.

La fontaine de jouvence coule à nouveau abreuvant les âmes et an­nihilant cette inextinguible soif qui les torturait depuis trop longtemps. Enfin, c'est l'absolution ; la libération totale et inconditionnelle de l'essence.

Les barrières, qui semblaient jusqu'alors infranchissables, tombent et écarquillent les yeux de toute la création, laissant l'émerveillement s'y installer. Les œillères s'en sont allées, laissant la vision s'esbaudir de cet uni­versel amour qui, de sa divine magie, transcende et englobe tout.

Quelque part, au milieu de cette fantasmagorie, une petite planète bleue participe silencieusement à cette transformation. Elle soutient ce grand dessein en harmonisant les existences, les âmes qui partagent sa destiné et en laissant planer le souffle prometteur de la rédemption, de la grâce.

L'un de ces habitants est particulièrement réceptif à cette évolu­tion, cette transformation, cette promesse qui l'attire, puis le guide et l'éveille.

 

Comme sortant d'un doux rêve, Richard s'est assis sur son lit, per­suadé que sa mère vient de l'appeler. Mais la nuit, le silence planent sur la de­meure familiale ; tout y est calme, endormi. Cependant, il se lève, descend vers le jardin poussé par une pulsion, aussi imperceptible qu'incompréhensible, qui le captive et le conduit, sans précipitation, vers l'extérieur.

Encore aux portes du rêve et du sommeil, il avance à tâtons, in­conscient de l'étrangeté de la situation. C'est donc avec confiance, avec sérénité, qu'il ouvre doucement la porte et pose ses pieds nus sur la terre nourricière. Aussitôt, il sait que cet instant lui appartient, qu'il est porteur de quelque chose de beau, de grand ; il le ressent, le pressent.

Du haut de ses huit ans, il lève la tête vers les cieux, isolé dans la nuit, et découvre un surprenant spectacle qu'il pense être joué pour lui seul. Son regard plein d'une étonnante ferveur, surprend les astres et les étoiles en plein mouvement, comme si ils se préparaient à une spatiale farandole. Etonnement cette perception ouvre une faille dans son cœur et y place la lumière puis un in­tense sentiment de bonheur, de bien-être. Au fond de cette anfractuosité, se dessine la surprenante vérité qui le déstabilise un peu et fait naître une forme de peine qui s'envole presque instantanément sans qu'il ne sache trop comment, ni pourquoi. Peut-être est-ce dû à cette petite voix qui parle à la pureté de son âme d'enfant et qui l'instruit de son prochain voyage de retour ; l'y prépare.

A présent, il sait ; tout est bien, tout est prêt ; l'heure est venue !

Comme pour répondre à cette injonction, une nuée d'étoiles semble se détacher et descendre vers la terre. Richard sait déjà que c'est vers lui qu'elles se dirigent. Elles viennent à sa rencontre, pour l'accompagner jusque chez lui.

Sachant qu'il ne peut faire demi-tour et revenir en arrière, les déci­sions incarnant ce moment ayant été prises il y a bien longtemps, il baisse la tête, se recueille. Ses dernière pensées vont à ses parents, à sa famille qui dort encore confortablement derrière son dos sans se douter un seul instant du des­sein qui se joue en ce moment. Mais, ses préoccupations quittent son esprit, s'éloignent ; maintenant, il est temps !

 

Guidé par des pulsions oubliées, Richard s'assoie au sol et respire ; il se prépare. Le douce litanie tombant du firmament s'est faite plus intense, plus vibrante à son oreille, renforçant son appel. Dans quelques instants le grand voyage va commencer et son être tout entier en a conscience, alors il s'y apprête calmement, ferme les yeux et laisse le destin prendre place.

Dans un premier temps, il plonge vers l'inconscience puis ses sens refont surface, étonnements différents. Il se sent léger, apaisé, prêt à être, à vivre, à tout. Si léger qu'il s'élève vers les cieux, laissant derrière lui sa famille, son passé et son corps.

Lentement tout d'abord, puis de plus en plus vite, il rejoint la fa­randole étoilée, se libère définitivement des liens qui furent tissés et créés dans les prémices de cette vie. Puis, un sourire illumine son visage lorsqu'il retrouve le peuple des étoiles, ses frères, ses sœurs. Ceux qui, comme lui, participent à l'Un, détenteur de toutes les dimensions du devenir.

Cependant, une voix, venant de loin, de plus bas, pleine de dou­leur, de peur, semble vouloir le retenir. Alors, il freine un instant sa progression et se retourne, une dernière fois, sur ce qui n'est pas encore englobé par l'intem­poralité. Là, il découvre sa mère, les bras tendus au ciel en une invocation fu­neste. Les larmes inondent son visage, déforment sa voix.

Mais Richard sait qu'il est maintenant trop tard, que Chronos s'est figé à tout jamais, que son destin est ailleurs. Cependant son cœur plein de joie, de compassion, ne s'est pas encore totalement libéré de son attachement ter­restre, de ses sentiments humains. Pour lui, c'est encore un peu sa maman. Cette perception fait monter une larme de douceur à ses yeux qui, brusquement, roule sur sa joue et quitte les cieux pour un voyage vers la terre.

 

Sa mère, toute à son affliction, ne voit pas la larme qui se dépose à ses pieds, dernier cadeau d'amour d'un enfant qui sait la souffrance mais ne connaît que la délivrance. Cadeau d'adieu pour celui qui retourne vers les cieux, parmi les siens, parmi les dieux.

Ivre de douleur, elle tombe à genoux, le visage dans les mains comme pour tenter d'endiguer le flot de ses pleurs. Puis ses jambes vacillent à leurs tours, l'obligeant à poser les mains au sol comme pour retenir le poids qui l'accable à cet instant. Elle est à son désespoir, à sa torture, prisonnière d'un piège occultant la beauté de l'instant. Puis, peu à peu, la vague de chagrin semble se retirer de son être et laisser place à une étonnante perception de la paix. De sa matrice monte un sentiment de joie, de bonheur indescriptible qui l'affranchit définitivement de sa souffrance, de son incompréhension.

Elle sait que Richard baigne désormais dans le flot universel de l'amour absolu, qu'il s'est libéré. Cette connaissance de la vérité ouvre son cœur, puis son esprit, tandis que les larmes peu à peu se tarissent, laissant place à un étonnant sentiment de joie, de bonheur, qui tisse sur son visage encore humide un sourire béat et complice.

Encore à genoux, les mains au sol, elle respire lentement, les yeux fermés, essayant de retrouver les sensations inhérentes à la vie terrestre. Sor­tant des abysses, elle redécouvre la vie, la réalité qui l'accompagne, reprend pos­session de ses sens, de ses perceptions.

Mais, elle ne se sent pas encore tout à fait prête à affronter cette nouvelle existence ; la peine est trop proche, trop palpable.

Toujours à terre, elle s'accorde un instant de répit, une minute de liberté, essayant de se débarrasser des dernières traces énergétiques de son pas­sage en enfer. Puis, parce que la vie doit continuer, parce que derrière, dans une chambre de la maison, dort encore Mélodie, sa désormais seule et unique en­fant, parce qu'il faudra lui expliquer où est allé son frère, puis la consoler et l'ai­der à grandir, elle fait un effort de volonté, reprend pied, reprend place.

En ouvrant ses yeux encore meurtris, elle devine tout d'abord plus qu'elle ne voit, un petit point brillant posé entre ses mains. Sans en avoir réelle­ment conscience, elle s'en empare, se relève lentement, le corps et le cœur en­core bien lourds, puis se dirige vers sa demeure.

En parcourant ces quelques mètres qui lui semblent s'étirer à l'in­fini, elle prend conscience de sa main serrée comme un étau, de la légère brû­lure qui stimule sa paume. Aussitôt elle s'arrête, ouvre doucement les doigts. Au milieu de cette main tendue, devant ses yeux, brille une petite larme de diamant, celle qui Richard lui a offerte pendant son ascension. Une larme de diamant comme cadeau d'adieu, symbole de la pureté d'un amour qui ne put être pleinement partagé sur cette terre. Symbole de beauté, d'espérance, de joie et de bonheur.

Cette offrande efface les dernières scories d'un ressentiment im­perceptible et la libère définitivement, lui accordant la paix. Maintenant, elle se sent merveilleusement bien, extraordinairement heureuse. Instinctivement, elle lève les yeux vers le ciel et lance une prière à l'univers qui semble éclater de rire comme un enfant ayant fait une bonne blague : « Va Richard. Sois heureux. Aime cette féerie mon enfant, tout y est si magnifique. Vie cette fabuleuse aven­ture à travers les étoiles, à travers l'univers. Moi je reste ici. Le temps court tou­jours sur le manuscrit de ma vie. Mais je sais quel fantastique amour tu portais et portes encore en toi. Merci pour tout. A bientôt ! »

Désormais tout est dit, compris, accepté. Elle referme la main sur le précieux cadeau puis reprend le chemin de la maison, le visage illuminé d'un invraisemblable bonheur. Elle retourne à sa vie, plus heureuse que jamais. Il y a encore tant de gens qu'elle aime ; tant à aimer !

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